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Toutes les clés pour comprendre le procès lancé aux US contre Apple pour monopole illégal. Pour tenter de démêler le bon grain de l'ivraie…
Apple fait face à une action en justice aux États-Unis pour monopole illégal sur le marché des smartphones haut de gamme, risquant des conséquences similaires à celles de Microsoft dans les années 90. Cette action, lancée par le DOJ, accompagné de 15 états et du District of Columbia, s’ajoute aux défis posés par les nouvelles réglementations européennes. La plainte du DOJ se concentre sur les pratiques monopolistiques d’Apple, notamment sa gestion des messageries, des paiements sans contact, de la compatibilité de l’Apple Watch, des applications de jeux en streaming, et des super-applications, qui, selon le DOJ, nuisent à la concurrence et aux consommateurs. Malgré les différences entre les législations antitrust américaines et européennes, Apple est critiquée pour son attitude rigide et arrogante, ayant déjà été condamnée en Europe pour concurrence déloyale. Le procès, qui ne commencera pas de sitôt, pourrait durer plusieurs années.
Pour lire mon article dans lequel je tente de démêler le bon grain de l’ivraie, c’est là : Procès Apple : les clés pour comprendre ce que reproche la justice américaine.
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iWeek (la semaine Apple) 177 + BONUS : Les applications bientôt téléchargeables via un site web
J’ai participé au numéro 177 d’iWeek, enregistré le 12 mars dernier.
Au sommaire de cet épisode 177 :
- Le DMA, ce séisme ! Après la volte-face d’Apple face à Epic Games avec le retour de Fortnite sur iPhone en Europe comme enjeu, Cupertino se concentre à nouveau sur le sideloading et annonce que certaines apps pourront être installées sur iPhone, en Europe, à partir du printemps, directement depuis le site web de l’éditeur ou du développeur, sous conditions.
- Le MacBook Air M3 est arrivé et il est entre les mains de Benjamin Vincent ! A suivre : les quelques informations qu’il a pu glaner chez Apple, avec le responsable du marketing produit pour la France : une heure à discuter, même sans pouvoir le citer, c’est toujours très intéressant.
- Le journal de la semaine avec les MacBook Pro M4 dans les tuyaux, iOS 18 qui pourrait ajouter une fonction d’aide auditive aux AirPods Pro actuels, et une fenêtre de tir pour l’annonce des nouveaux iPad, iPad Air et iPad Pro M3 OLED… Ça approche !
- Et puis, le bonus hebdo exclusif pour notre communauté Patreon. Cette semaine : retour sur l’Apple Car, un gouffre financier qui aurait coûté leur place à nombre de grands patrons mais pas à Tim Cook. Pourquoi ?
Présentation : Benjamin Vincent avec la participation de Gilles Dounès et Fabrice Neuman.
Pour écouter:
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IA : Intelligence artificielle ou Intelligence augmentée ? Sortons-nous du piège de l’anthropomorphisme.
Illustration de l’Intelligence Augmentée (image générée par IA Playground via PerplexitySuite à la conférence que j’ai animée le 18 mars dernier, voici mes réflexions presque en forme de plaidoyer pour utiliser l’expression Intelligence Augmentée à la place d’Intelligence Artificielle, que je trouve inadaptée et source de beaucoup de mauvaises interprétations.
TL;DR
Résumé du texte via GPT–4 Turbo (128k) Ce texte propose une réflexion sur l’intelligence artificielle (IA) et son impact. Il met en garde contre l’anthropomorphisme et insiste sur la distinction entre l’IA et l’intelligence humaine, soulignant que l’IA n’ pas d’imagination propre. Il rappelle l’histoire et l’utilisation quotidienne de l’IA, et suggère de renommer l’IA en “Intelligence Augmentée” pour refléter son rôle d’outil augmentant les capacités humaines. Enfin, il invite à une réflexion prudente sur l’impact sociétal de l’IA, la considérant comme une chance de poser collectivement les bonnes questions.
Extrait
«La première étape d’une réflexion dépassionnée sur le sujet de l’IA consiste à mon sens à réparer l’erreur d’appellation de 1956 pour adopter l’expression d’Intelligence Augmentée. Outre le fait qu’elle utilise les mêmes initiales […], cette nouvelle IA inverse aussi avantageusement la proposition en redonnant à l’intelligence sa véritable provenance, l’humain. C’est l’humain qui pense, c’est l’humain qui réfléchit, c’est l’humain qui sait donc faire preuve d’abstraction. Et les outils comme l’IA sont là pour augmenter les capacités humaines.»
Commençons par dire que ce texte n’a pas été rédigé par l’Intelligence Artificielle.
En tout cas, pas complètement… Car oui, il a tiré parti des extraordinaires capacités de traitement de l’IA pour aider à ma réflexion. Et parmi les réflexions que m’inspirent les incessantes discussions autour de l’IA et de ses dangers qui inondent les discours et débats, il en est une qui me vient souvent à l’esprit : gardons-nous de tomber dans le piège de l’anthropomorphisme. Cette démarche de prudence qui semble raisonnable en toutes circonstances est devenue plus importante encore à adopter depuis l’éclosion, ou disons plutôt l’explosion, de l’IA générative, c’est-à-dire celle qui a donné naissance aux chatbots (agents conversationnels en français) qui nous fournissent des interlocuteurs synthétiques criant de vérité et aussi des créateurs de fausses images plus vraies que nature. Et prenons soin également de ne pas confondre la corde de l’IA générative avec l’arc de l’intelligence artificielle.
À ce stade, il semble nécessaire de poser quelques définitions. Lorsque l’on parle d’intelligence, l’exercice est difficile. Je vais donc demander de l’aide à… non, rassurez-vous… à un physicien et philosophe des sciences. Lors d’une conférence sur le thème de l’intelligence artificielle à Lyon en décembre 2023, Étienne Klein définit l’intelligence humaine comme «[…] savoir raisonner, savoir argumenter, avoir un esprit critique qui doute et surtout une capacité d’abstraction». Et il la compare à l’Intelligence Artificielle en expliquant que «L’IA n’est qu’une suite de corrélations. Elle ne peut produire que des choses qu’elle a déjà vu. Impossible d’imaginer en dehors d’un set de données».
Dans ce contexte, on peut définir l’IA de cette manière : «L’intelligence artificielle désigne la capacité d’une machine à imiter les fonctions cognitives humaines telles que l’apprentissage, la résolution de problèmes et la reconnaissance de formes. Les systèmes d’IA peuvent effectuer des tâches qui nécessitent normalement l’intelligence humaine…».
Et parmi ces tâches, il y a par exemple la rédaction de la définition vous venez de lire…
Notre utilisation quotidienne de l’IA
En réalité, cela fait bien longtemps que nous utilisons l’Intelligence artificielle dans notre quotidien, même si pendant longtemps elle se cachait sous d’autres noms, souvent technique comme « l’apprentissage machine » ou presque ésotérique comme « les réseaux neuronaux ». Nous prenons tous ou presque des photos à l’aide d’un smartphone. Mais ce n’est pas une image que capture l’appareil quand on appuie sur le bouton, mais cinq, dix ou plus en un clin d’œil. Ensuite, le smartphone s’appuie sur l’IA pour choisir les « bonnes » portions de chaque image et composer la photo finale, aussi parfaite que possible. En nous sauvant par exemple d’un contre-jour dévastateur. Seriez-vous prêt à jeter aux orties ce créateur d’images ?
Naissance de l’expression mal choisie d’Intelligence Artificielle
Pour remonter encore un peu plus loin, rappelons que les réflexions et les recherches sur une intelligence synthétique, autrement dit non-biologique, ne datent pas d’hier. On fait souvent remonter la naissance de l’Intelligence Artificielle à 1956 et spécifiquement à une conférence organisée à Dartmouth dans l’état du New Hampshire aux États-Unis et dont une des thèses développées était que « chaque aspect de l’apprentissage ou toute autre caractéristique de l’intelligence peut être si précisément décrit qu’une machine peut être conçue pour le simuler » (lire l’article consacré à l’histoire de l’IA sur Wikipedia. Et c’est pendant cette conférence qu’a été proposée l’expression « Intelligence Artificielle » pour décrire ce domaine de recherche. Cela dit, on pourrait dire qu’il s’agit seulement de la naissance de l’expression car ce serait oublié un peu vite par exemple les travaux du mathématicien anglais Alan Turing qui dès 1950 spécule sur la possibilité de créer des machines dotées d’intelligence. On parle d’ailleurs souvent du test de Turing, pour déterminer si une machine, un agent conversationnel par exemple, est capable de tromper un humain en se faisant justement passer pour un humain alors qu’il ne s’agit que d’une machine prédictive comme on l’a vu. L’expression test de Turing est arrivée plus tard. Le mathématicien utilisait lui l’expression « jeu d’imitation ». Le film The Imitation Game le montre avec brio.
Détail de “La Bombe”, la machine inventée par Alan Turing pour déchiffrer Enigma
Le problème, c’est que ces IA conversationnelles sont devenues si sophistiquées dans leur capacité d’imitation qu’elles provoquent en nous des émotions. Début 2023, par exemple, un journaliste du New York Times, Kevin Roose, raconte sa conversation avec un chatbot qui au bout de deux heures lui déclare tout à la fois sa volonté d’être vivant, son amour et son désir de destruction. Kevin Roose raconte qu’il est sorti très affecté de cette conversation. Ah, anthropomorphisme quand tu nous tiens. Car sans nier l’impact émotionnel ressenti par ce journaliste et d’ailleurs par des milliers d’autres utilisateurs d’agents conversationnels dont certains s’en servent déjà comme supports émotionnels efficaces, c’est oublier un peu vite que l’agent conversationnel n’en a pas, lui, d’émotion. Il ne fait que réagir statistiquement aux questions ou réflexions qu’on lui soumet et ne se nourrit donc que de ce qu’on lui donne.
Sommes-nous dépassé·es par la machine?
Notre penchant humain naturel nous faisant chercher (et trouver !) du sens et des émotions dans ce qui nous entoure, il nous faut absolument nous sortir du piège de l’anthropomorphisme pour aborder avec distance les questions que nous pose l’IA, et elles sont nombreuses indéniablement. Pour n’en citer que quelques-unes : serons-nous ou ne sommes-nous pas déjà dépassés par la machine ? Le cerveau est-il l’unique siège de la pensée et si oui, le restera-t-il longtemps ? Plus simplement peut-être, prenons-nous le risque d’affaiblir nos cerveaux en nous appuyant trop sur les capacités de l’IA ?
Dans l’exemple de la machine qui nous dépasse, on peut arguer que l’histoire de l’humanité en est remplie. L’invention de l’écriture n’a-t-elle pas modifié notre rapport à la mémoire ? Tellement même que Socrate y était opposé ! Les mots écrits étaient pour lui une matière inerte, sans nuance ni profondeur. Seul le dialogue, la fameuse méthode socratique d’enseignement, permet de les charger de sens en les questionnant. Aujourd’hui, on serait pourtant bien en peine de se passer d’écriture. Cela fait-il de nous des êtres humains inférieurs ? Plus récemment (bien plus !), la machine est devenue imbattable au jeu d’échecs, ainsi qu’au jeu de Go d’ailleurs. Aucun grand maître humain n’aurait la vanité de penser pouvoir la vaincre. Cela fait-il là aussi de nous des êtres inférieurs ? Rappelons d’abord que ces machines sont des inventions humaines. Et qu’elles permettent aussi d’améliorer le niveau des meilleurs joueurs, en leur donnant des adversaires à leur mesure. Cela n’empêche pas ensuite d’organiser des compétitions malgré tout, entre humains uniquement cela va sans dire. Il faut opposer ce qui est opposable, comme comparer ce qui est comparable. Qui aurait par exemple l’idée d’organiser des épreuves olympiques mélangeant des adultes et des enfants ?
L’Intelligence (humaine) Augmentée
La première étape d’une réflexion dépassionnée sur le sujet de l’IA consiste à mon sens à réparer l’erreur d’appellation de 1956 pour adopter l’expression d’Intelligence Augmentée. Outre le fait qu’elle utilise les mêmes initiales, ce qui en facilite son adoption aussi bien en français qu’en anglais d’ailleurs, cette nouvelle IA inverse aussi avantageusement la proposition en redonnant à l’intelligence sa véritable provenance, l’humain. C’est l’humain qui pense, c’est l’humain qui réfléchit, c’est l’humain qui sait donc faire preuve d’abstraction. Et les outils comme l’IA sont là pour augmenter les capacités humaines.
Une nouvelle bicyclette pour l’esprit
Dans une interview de 1990, Steve Jobs, le célèbre créateur d’Apple, se souvient d’un article de la revue Scientific American qui comparait l’efficacité énergétique de toutes les espèces animales de notre planète pour se déplacer d’un point à un autre. C’est le condor qui s’est retrouvé en haut de la liste, tandis que l’humain était relégué au dernier tiers. Pas terrible. Mais donnez un vélo à un humain et il devient l’espèce la plus efficace, de loin. L’être humain est un constructeur d’outils et pour Steve Jobs, l’ordinateur est une bicyclette pour l’esprit. L’IA est une extension de cette proposition.
L’Intelligence Augmentée est à notre disposition pour nous donner de nouvelles capacités, par exemple des capacités d’analyse de grandes quantités de données. Bien sûr, si je commence à parler d’humain augmenté, je suppose que certains vont me taxer de transhumanisme. Loin de moi l’idée de m’aventurer dans ce domaine. Mais je voudrais tout de même faire remarquer que nous sommes tous déjà des êtres peu ou prou augmentés, on pourrait aussi dire réparés, par les progrès techniques : nous portons des lunettes ou des prothèses auditives par exemple, ou encore une prothèse de hanche, voire un stimulateur cardiaque qui nous rendent la vie plus facile. Ou tout simplement la vie possible.
C’est tout le propos du psychiatre et chercheur en neuroscience Raphaël Gaillard dans son lire récemment paru L’homme augmenté. Je cite, tiré de son introduction :
«La question n’est pas de savoir si l’augmentation de l’homme par la technologie est possible. Cette révolution qui voit s’hybrider l’être humain et la technologie par des interfaces cerveau-machine est déjà en marche. La question n’est pas de choisir son camp entre les zélotes et les contempteurs de cette hybridation, entre ceux qui s’enthousiasment sur les réseaux sociaux et ceux qui la conspuent dans les salons littéraires. Ces réactions à l’emporte-pièce sont celles d’êtres humains qui, à l’évidence, ne bénéficient pas encore du surcroît d’intelligence que promet cette hybridation. Les seules questions qui vaillent et que nous explorerons ici sont pragmatiques : quelle est la réalité du phénomène à ce jour, quelles en sont les perspectives, quelles en sont les possibles effets indésirables, comment se prémunir de ces derniers, et plus généralement comment accompagner au mieux ce mouvement inéluctable ?».
Je ne peux que recommander la lecture de ce brillant essai.
L’IA pour nous faire réfléchir
Je ne veux évidemment pas me cacher derrière mon petit doigt en proposant un simple changement d’appellation. Augmentée ou pas, l’IA est d’abord un nouvel outil en devenir que nous devons apprendre à utiliser, à maîtriser, à intégrer. Car, ne nous y trompons pas, aucune régulation, désirée ou non, ne la fera disparaître. L’IA est semée d’embûches, de tromperie, de fake news et de théories de remplacement. Plus qu’une catastrophe en devenir, je vois plutôt dans l’arrivée du chaos de l’IA une nouvelle occasion de nous poser collectivement les bonnes questions notamment concernant nos sources d’information. Peut-être avons-nous trop pris l’habitude de prendre pour argent comptant les réponses des moteurs de recherche. On parle souvent des erreurs flagrantes et des hallucinations de l’IA. Certaines sont amusantes comme lorsque c’est l’image d’une glace au chocolat qui apparaît lorsqu’on lui demande une glace à la vanille. Ou lorsque l’IA est capable sans broncher de produire plusieurs paragraphes explicatifs sur les différences entre l’œuf de poule… et l’œuf de vache. D’autres erreurs sont bien plus problématiques, voire dangereuses, lorsque des erreurs historiques factuelles viennent encombrer ces réponses, produisant ici, sans broncher, des résultats d’élections qui n’ont pas encore eu lieu ou, là, des images de groupes d’officiers nazis rassemblant tout à la fois des femmes, des hommes à peau noire ou d’ascendance indo-européenne.
Ces résultats bizarres nous font, et doivent nous faire, de nouveau douter, chercher, recouper nos informations. Saisissons-nous de cette chance. Sachons trouver le bon équilibre entre les horreurs supposées et les bienfaits magiques tout autant exagérés de l’IA. L’IA soulève des questions philosophiques profondes sur la nature même de l’intelligence et de la cognition. Comme toute technologie, elle peut être vue soit comme un outil au service de l’humain, soit comme une menace potentielle. Réfléchissons à ces enjeux et à l’impact sociétal de l’IA, afin de mettre le progrès technologique au service de l’amélioration matérielle, morale, intellectuelle et sociale de l’humanité.
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Un grand merci à la Mairie de Toulouse et à l'équipe du Domaine Senior de m'avoir accueilli pour la conférence que j'ai eu le plaisir d'animer le 18 mars dernier dans l'amphithéâtre du Sénéchal.
J’ai tenté de souligner l’importance de comprendre l’IA comme une extension de nos capacités plutôt que comme un substitut à l’intelligence humaine. Je reviendrai bientôt plus en détail sur ce sujet dans un article qui y sera consacré.
Un grand merci également aux 60 ou 70 personnes venues écouter et surtout échanger sur le sujet.
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Incroyable ! Il sera bientôt possible d'installer des applis sur son iPhone depuis un site Web, comme sur un «vulgaire» PC ou Mac. Encore un effet du DMA européen, même si les conditions imposées par Apple sont nombreuses.
Dans un communiqué du 12 mars 2024, Apple annonce qu’il sera bientôt possible de ne plus passer par son App Store, ni même par une place de marché alternative pour installer une application sur son iPhone. Un simple téléchargement depuis un site Web suffira… Naturellement, les conditions imposées par Apple aux développeurs qui souhaitent suivre ce chemin sont drastiques, mais le fait est là : l’utilisation de notre précieux risque de radicalement changer dans les mois et les années qui viennent. Et on ne sait pas encore si ce sera en mieux.
Je détaille tout dans cette actu parue sur Comment Ça Marche.